Le salafiste et les bobos
Merwan Benlazar, soutenu par les musulmans et les fréristes, l'est aussi par les neuneus utiles de Radio France.
Merwane Benlazar, grand amateur de randonnées salafistes comme montré ici, a suscité après son éviction de France 5 une micro levée de boucliers, publiée comme il se doit chez Mediapart. Les soutiens de Merwane participent de deux typologies exclusives : d’une part quelques comiques apparentés au Jamel comedy club (relevant en l’occurrence de la catégorie des seconds, voire des tierces couteaux), d’autre part les animateurs-chroniqueurs-humoristes du service public, à savoir France Inter, où Benlazar officie chaque lundi. L’argumentaire entremêle poussivement les mêmes motifs, ci-dessous identifiés.
Motif 1 : la reductio ad vestimentum
Qualifier de marqueurs islamistes les vêtements et la barbe de Benlazar relèverait, selon ce motto, du préjugé (sous-entendu raciste ou islamophobe, l’un valant pour l’autre). Tout le monde le sait, en effet : un bonnet n’est qu’un bonnet, une barbe une barbe, et rien ne différencie l’abaya de la robe longue. On nous avait déjà fait le coup avec le voile-simple-bout-de-tissu, sur fond de “Ah bah qu’est-ce qui vous prouve que c’est un signe religieux ?”. Cela avait, ma foi, plutôt bien fonctionné, puisqu’à ce jour encore, prendre le voile pour ce qu’il est (un signe shariatique) peut susciter ce genre de commentaire. Le sophisme est ici repris, et adapté au masculin.
Charline Vanhoenacker, toujours sur les starting-blocks pour distancer les copains dans le nawak, franchit un pas supplémentaire : l’apparence de Benlazar, écrit-elle, ne serait qu'une “blague potache”. Tant il est vrai ! La vue d’une barbe non taillée, d’un bonnet Zara-calotte de bigot muslim et d’un gros pull-djellaba, faut reconnaître : c’est cascades de rires en cascade, la garantie d’heures de rigolade, seul ou entre amis !
Alex Vizorek, lui, la joue sérieux, inscrivant le port de la barbe dans le cadre juridico-politique des libertés individuelles (garanties pour rappel par l’État-de-droit, nos-valeurs-républicaines, les Droits-de-l’homme, le droit-international-et-la-démocratie gnagnagna) :”En France, dit-il, on a le droit de se laisser pousser la barbe”. Vizorek plane là dans les hautes sphères de l’intellection, pas nécessairement accessibles au commun dont toi et moi, camarade, faisons partie. Son propos néanmoins n’est-il pas marqué du sceau de la Vérité ? Tout comme celui qui consiste à invoquer la “liberté vestimentaire” dès qu’il est question du voile ?
Yann Marguet, ci-dessus à gauche, lui aussi membre de la France Inter comic team, a visiblement inspiré l’outfit de son collègue. Il lui a également offert, ce faisant, la possibilité de se dédouaner de tout reproche en salafisme. Sur Twitter, on trouve ce photomontage, dont le message est on ne peut plus clair : la barbe de Benlazar, c’est juste un truc de hipster (mais rien à voir avec le salafisme, hein). Ok d’accord. Et si pour rigoler un peu, on jouait à “Cherchez l’intrus” en comparant les trois barbus ici présents ?